Un divorce présente des éléments d’extranéité en cas de divorce entre un français et un étranger ou lorsqu’au moins l’un des deux époux réside à l’étranger même si  les deux époux sont français. Le divorce est alors un divorce international qui présente des spécificités. Il va en effet falloir déterminer la loi applicable au divorce et les juridictions compétentes.


Le tribunal saisi va dans un premier temps  vérifier qu’il est compétent  (compétence juridictionnelle) puis examiner la loi qui doit être appliquée ( compétence législative).

Un ensemble législatif conséquent de conventions internationales et bilatérales va s’appliquer pour déterminer la loi applicable au divorce.

Or il n’existe pas une loi applicable au divorce mais des lois applicables au divorce.

Il conviendra ainsi de déterminer la loi applicable au divorce lui-même, la loi applicable aux obligations alimentaires entre époux,  la loi applicable aux obligations alimentaires concernant les enfants, la loi applicable à la responsabilité parentale et la loi applicable à la liquidation du régime matrimonial. La plupart des justiciables ignorent  que la loi qui va régir leur régime matrimonial et sa liquidation ne sera pas nécessairement la loi qui régira leur divorce.

En droit interne français, les époux sont soumis à défaut de contrat au régime matrimonial de la communauté légale. Les époux ont également la possibilité de conclure avant le mariage un contrat par lequel ils adoptent le régime de la séparation des biens ou plus rarement de la participation aux acquêts ou de la communauté universelle.

Deux époux peuvent avoir la nationalité française, résider en France, divorcer en France et découvrir à l’occasion du divorce qu’une loi étrangère va être compétente pour régir la  liquidation de leur  régime matrimonial. Or selon le régime matrimonial applicable les droits des époux seront bien différents lors de la liquidation du régime matrimonial.

Il convient donc de déterminer   la loi applicable au régime matrimonial.

Différentes conventions internationales ayant été conclues, il convient de distinguer selon la date du mariage :

Pour déterminer la loi applicable au régime matrimonial, on distingue traditionnellement selon que les époux se sont mariés avant  ou après  le 1er septembre 1992, date d’entrée en vigueur en France de la convention de La Haye du 14 mars 1978. De plus  de nouvelles règles seront applicables pour les époux qui se sont mariés  après le  29 janvier 2019 .

Mariages célébrés avant le 1er décembre 1992 :

Concernant les mariages célébrés  avant le 1er septembre 1992, les époux ont la possibilité de choisir la loi applicable au régime matrimonial.

Ce choix peut résulter d’une clause du contrat de mariage désignant la loi applicable.

À défaut d’un choix exprès, il convient de  rechercher quelle est la loi implicitement choisie par les époux.  La loi applicable au régime matrimonial des époux est déterminée, à défaut de choix de leur part, en considération, principalement, du lieu de leur premier domicile commun.

La Cour de cassation  a néanmoins précisé  que la présomption en faveur du premier domicile commun peut être détruite par tout autre élément de preuve pertinent, tiré notamment de l’attitude des époux après leur mariage s’ils peuvent prouver leur intention de se soumettre à une autre loi.

Concernant les mariages célébrés avant le 1er septembre 1992, la loi applicable sera en  principe déterminée par le lieu de fixation du premier domicile commun. Cette loi va  régir l’ensemble des relations patrimoniales des époux quel que soit le lieu de situation de leurs biens. Ce critère de rattachement est permanent : la loi du premier domicile commun s’applique pour toute la durée du mariage, même si les époux déménagent dans un autre Etat.

Mariages célébrés entre le 1er septembre 1992 et le 28 janvier 2019:

C’est la convention de la Haye du 14 mars 1978, entrée en application en 1992 qui va s’appliquer pour  déterminer le régime matrimonial applicable aux couples binationaux ainsi qu’aux couples franco-français résidant hors de France.

Depuis  l’entrée en vigueur de la Convention de La Haye et jusqu’au 28 janvier 2019, les époux peuvent toujours choisir la loi applicable à leur régime matrimonial mais la désignation est limitée à l’une des trois lois visées à l’article 3 de la convention : loi d’un Etat dont l’un des époux a la nationalité au moment de cette désignation, loi de l’Etat sur le territoire duquel l’un des époux a sa résidence habituelle au moment de cette désignation, loi du premier Etat sur le territoire duquel l’un des époux a établi une nouvelle résidence habituelle après le mariage. La Convention de La Haye autorise les  époux à soumettre les immeubles ou certains d’entre eux à la loi de leur lieu de situation ( article 3 alinéa 2).

La Convention de La Haye impose que la désignation de la loi applicable fasse l’objet d’une stipulation expresse ou qu’elle résulte  des dispositions du contrat de mariage ( article 11).

A défaut de choix, La Convention  de la Haye prévoit que les couples qui se sont mariés après le 1er septembre 1992 sans faire de contrat de mariage sont soumis aux dispositions du régime légal du pays dans lequel ils s’installent. Mais s’ils déménagent par la suite dans un pays où le régime légal est différent, ils se verront ensuite appliquer ce régime.

Différents régimes matrimoniaux vont ainsi pouvoir se succéder au fil du temps en fonction des pays dans lesquels les époux se sont établis. Ce cas n’est pas un cas école et ces dispositions peuvent  toucher de nombreux français à l’expatriation.

La Convention de La Haye prévoit  donc des  changements automatiques de la loi applicable dans les  cas  énumérés à l’article 7 de la convention .

Cette mutabilité automatique n’est pas sans poser problème car elle est généralement inconnue des époux.

Mariages conclus à partir du 29 janvier 2019  ou mariages conclus avant cette date mais lorsque les époux ont effectué un choix de loi applicable à leur régime matrimonial à partir du 29 janvier 2019 :

Le  règlement européen (UE) 2016/1103 du 24 juin 2016  s’applique depuis le 29 janvier 2019.

De nouvelles dispositions  s’appliquent pour déterminer la loi applicable à tous les mariages célébrés à partir du 29 janvier 2019 ainsi qu’aux mariages conclus avant la date d’entrée en vigueur du règlement lorsque les époux ont effectué un choix de loi applicable à leur régime matrimonial à partir du 29 janvier 2019.

A défaut de choix de loi, l’art. 26 du règlement fixe de manière hiérarchisée les facteurs de rattachement pour déterminer la loi applicable :

  • La première résidence habituelle commune des époux peu après la célébration du mariage.
  • A défaut, la nationalité commune au moment du mariage.
  • A défaut, la loi de l’État avec lequel les époux ont ensemble les liens les plus étroits au moment de la célébration du mariage.

Les époux ont toujours la possibilité de choisir la loi applicable à leur régime matrimonial.

Le règlement (UE) 2016/1103 instaure  la possibilité de choisir la loi d’un des États dont au moins un des conjoints possède la nationalité ou la loi de la résidence habituelle de l’un ou l’autre conjoint au moment du choix entant que  loi applicable à leur régime matrimonial (art. 22). Ce choix ne peut être effectué valablement qu’à partir du 29 janvier 2019 dans le cadre d’un contrat de mariage ou d’une convention de choix de loi applicable et respectant les conditions de forme fixées par l’art. 23.

Le choix de loi applicable au régime matrimonial au cours du mariage, n’aura d’effet que pour l’avenir, sauf convention contraire des époux et sous réserve de ne pas  porter atteinte aux droits des tiers.

Le règlement européen entré en application depuis le 29 janvier 2019 va venir peu à peu limiter les difficultés posées par la mutabilité automatique prévue par la Convention de la Haye . Toutefois par souci de sécurité juridique la solution la plus sûre est de choisir la loi applicable au régime matrimonial dès le mariage, soit dans le contrat de mariage, soit lorsque les époux n’établissent pas de contrat de mariage, par la signature d’une convention de choix de loi applicable .

Encore faut-il que les justiciables soient informés de cette possibilité au moment du mariage, ce qui est rarement le cas.

Dominique FERRANTE

Avocat à PARIS

http://www.ferranteavocat.com