Le 18 mai 2013, le législateur a autorisé « le mariage pour tous » en insérant dans le Code Civil un article 143 ainsi rédigé : « le mariage est contracté par deux personnes de sexe différent ou de même sexe ».

Longtemps attendu, cet article controversé mais aujourd’hui incontournable règle définitivement sur le plan juridique la question du mariage des couples de même sexe. Ce texte pose toutefois quelques problèmes quant aux effets du mariage et plus particulièrement l’un d’entre eux : la présomption de paternité.

L’article 312 du Code Civil est ainsi rédigé : « L’enfant conçu ou né pendant le mariage a pour père le mari ».

Cet article n’a pas été modifié. Un des effets du mariage est, entre autre, de permettre que les enfants nés ou conçus pendant l’union aient pour père le mari. Cette présomption peut être écartée ou faire l’objet d’une action en justice, mais elle a le mérite de donner un père à l’enfant de façon automatique, ce qui n’est pas le cas pour les enfants nés de parents non mariés. L’objet de cette présomption est la protection de l’enfant et la paix des foyers.

L’absence de modification de ce texte pose plusieurs problèmes :

En premier lieu, la question se pose de savoir si la présomption pourra jouer pour les enfants nés ou conçus pendant le mariage de deux femmes. L’épouse d’une femme qui accouche pendant le mariage peut-elle prétendre être également la mère de l’enfant ou devra-t-elle recourir à l’adoption ?

Si on applique l’article 312 à la lettre, la réponse sera négative puisque ce texte parle « du mari ». Or dans notre hypothèse, le couple est composé de deux femmes. Il est toutefois choquant qu’une discrimination soit ainsi établie selon que le couple marié sera ou non du même sexe. « Le mariage pour tous » avait pour objet de mettre fin à la discrimination dont souffraient les couples de même sexe, l’objet n’est donc pas encore atteint.

En second lieu, on peut s’interroger sur le fait de savoir si deux époux de sexe masculin pourraient invoquer la présomption. Si on prend la lettre du texte de l’article 313, la réponse sera positive : l’enfant a pour père le mari. L’époux qui aura conçu un enfant (et la preuve en sera aisée avec les expertises ADN) pourrait parfaitement se prévaloir de ce texte. On voit là l’absurdité du conflit qui en résulterait puisque l’enfant aura aussi une mère. Toutefois la mère peut avoir accouché sous X ou ne pas avoir reconnu l’enfant. La présomption pourra-t-elle alors jouer si l’enfant n’a pas de filiation maternelle établie ? Cet exemple de la présomption de paternité, effet du mariage connu sous l’adage latin « pater is est quem nuptiae demonstrant», montre que la loi sur « le mariage pour tous » aurait dû être murie et réfléchie dans le cadre d’une refonte globale des textes.

Il est à prévoir que le législateur, quand il se penchera à nouveau sur le droit de la famille, supprime bonnement et simplement cette présomption de paternité qui a longtemps été un des socles de la famille.

Requiem pour une présomption défunte !

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